Décryptage en presse
Congrès des notaires 2020
15/01/2021
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3 propositions marquantes pour améliorer la protection patrimoniale en France
Le congrès des notaires 2020, ayant pour thème la protection a finalement eu lieu, en dépit des vicissitudes liées au contexte sanitaire.
Rappelons que le Congrès des notaires a pour utilité de suggérer aux pouvoirs publics des modifications législatives, soit parce que les outils juridiques existants paraissent, aux yeux des notaires et de leurs clients, obscurs et générateurs de contentieux, soit parce que certains textes ne paraissent plus en adéquation avec les aspirations des citoyens et l’évolution de la société.
Vue au travers du prisme de la protection, la tâche apparaissait d’une ampleur significative.
Trois modifications parmi celles proposées par l’équipe des congressistes peuvent sur un plan très pratique, retenir l’attention.
La première concerne la situation du partenaire PACSE survivant. D’une part, la loi ne lui réserve aucune place successorale particulière dans la succession de l’autre, quand bien même il serait exonéré de toute fiscalité successorale, le droit fiscal étant pour une fois en avance par rapport au droit civil. D’autre part, sa vocation héréditaire, qui ne peut relever que d’un testament établi par l’autre membre du couple, se heurte à la limite de la réserve héréditaire des descendants du prémourant. Ainsi, le legs permettant au partenaire de rester dans la résidence du couple sa vie durant risque fort, lorsque ce bien constitue le seul actif d’importance de la succession, de dépasser la quotité disponible et par ce fait d’imposer à son bénéficiaire le versement d’une indemnité aux enfants pour pouvoir conserver la jouissance du bien.
Le Congrès a donc proposé que lorsque ce souhait est ainsi exprimé par le défunt, le partenaire survivant puisse conserver la jouissance de la résidence principale sa vie durant sans qu’il soit contraint de dédommager les enfants.
La seconde proposition visait à redynamiser le mandat de protection future. On sait que ce mandat vise à anticiper, de manière conventionnelle, un affaiblissement des facultés cognitives et/ou physiques qui justifierait le recours à une mesure de protection judiciaire, tutelle ou curatelle. Cette mesure anticipatrice permet de désigner par avance la personne de confiance qui sera chargée de la gestion du patrimoine et plus généralement des intérêts du mandant. L’éviction du juge n’est pour autant pas totale : dès lors que le mandataire entend vendre la résidence principal ou secondaire, il doit obtenir l’accord du magistrat. Ces actifs constituant le plus souvent une part importante du patrimoine du mandant, le mandataire est à nouveau en butte aux lenteurs de la justice. De fait, il est apparu aux usagers que ce mandat ne procurait pas, la plupart du temps, un avantage significatif au regard d’une mesure judiciaire.
C’est pourquoi le Congrès a proposé que le domicile principal comme secondaire puisse être cédés par le mandataire seul, sous le contrôle d’un second mandataire nommé dans le mandat lui-même.
La troisième proposition se signalait par son ambition : elle visait à encourager le recours à l’investissement locatif tout en favorisant la rénovation des logements et la fluidité de leur transmission. Les mesures évoquées s’appuyaient tant sur des modifications civiles que fiscales. Civiles dans la mesure où il a été imaginé de créer un congé pour rénovation, afin d’adapter le locatif aux nouvelles normes environnementales. Fiscales, dans la mesure où les conditions de déductibilité des travaux et les conditions de détermination des plus-values taxables en cas de vente seraient améliorées, et que seraient dans le même temps encouragées des transmissions de biens immobiliers à des héritiers dès lors que ceux-ci prendraient des engagement de rénover pour mettre le logement aux normes, puis de le louer pendant une certaine durée. Il s’agit incontestablement de mesures intelligentes, génératrices d’activité et donc d’emploi, et permettant de concilier à la fois les intérêts des bailleurs et des locataires, dont on peut penser qu’elles ne sont pas toujours aussi contradictoires qu’on veut bien nous les présenter. Malheureusement, ces suggestions peuvent être à courte vue regardées comme sacrificielles des deniers publics et donc être reléguées aux oubliettes tant que les comptes de l’Etat n’auront pas repris des couleurs.
En tout état de cause, l’examen de ces quelques propositions démontrent que pour les notaires, la notion de protection ne relève pas d’un concept iréel, mais s’enracine bel et bien dans les préoccupations quotidiennes de nos concitoyens.
Par Gilles Bonnet, notaire associé KL Conseil