Éclairage

LE SORT DES DONNEES PERSONNELLES AU DECES DE L'INTERNAUTE

06/12/2022

Décryptage de Xaviera Favrie, notaire

Que vont devenir l’ensemble de mes données numériques à mon décès ? Cette question, peu de clients la posent lorsqu’ils viennent à l’Etude pour anticiper leur transmission. Pourtant, aujourd’hui, chaque personne dispose d’innombrables informations sur les sites utilisés quotidiennement : avis, photographies et vidéos postées, messages… 

Du vivant de l’utilisateur, le Règlement Général de Protection des Données (RGPD), texte règlementaire européen qui encadre le traitement des données au sein de toute l’Union Européenne, permet à chacun la maîtrise de ce qui s’appelle, en droit numérique, nos données personnelles. L’internaute a ainsi le droit de rectifier, collecter, retirer les données déposées. Ces données dites extra-patrimoniales ne constituent pas un actif successoral en soi.  

Malgré tout, le sort de ces données au décès de l’internaute doit être traité. Quand il ne sera plus là pour se connecter, qui pourra les gérer, les supprimer ? Car le décès de l’internaute n’emporte pas suppression de l’intégralité des données.   

En effet, la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés de 1978 modifiée à plusieurs reprises, prévoit à l’article 84 que tous les droits, accès, portabilités…. disparaissent mais qu’ils peuvent être provisoirement maintenus, sans qu’aucun terme n’ait été précisé ! 

L’article 85 prévoit que toute personne peut définir des directives relatives à la conservation, à l’effacement et à la communication de ses données à caractère personnel à son décès, ces directives pouvant être générales ou particulières.  

Les directives générales concernent l’ensemble des données à caractère personnel de l’internaute et peuvent être enregistrées auprès d’un tiers de confiance numérique certifié par la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL). Tandis que les directives particulières concernent les traitements des données spécifiques comme se rapprocher d’un réseau tel que Facebook pour supprimer, par exemple, l’intégralité des messages, des photos… 

Chaque personne doit donc se pencher sur la question suivante : Qui exercera mes droits et demandera l’exécution de mes directives à mon décès ? Qui vais-je désigner pour exercer cette mission ?    

Pour prendre ce type de directives, aucune forme particulière n’a été prévue ni aucun type d’enregistrement. Tout peut donc être imaginé. Cela peut être déposé auprès de toute personne. Une grande liberté a été laissée à l’internaute soucieux d’anticiper cet aspect.  

A prime abord, il est simple de se dire qu’il suffit de laisser ses mots de passe, logins… à une personne de confiance, ou de lui préciser que les informations seront à tel endroit. Mais d’une part, cela peut être très dangereux si une personne arrive à y avoir accès (accès aux comptes bancaires, aux impôts…) et d’autre part, les mots de passe sont régulièrement changés et la liste confiée peut vite devenir obsolète.  

La mise en place de directives est donc le moyen le plus sûr de laisser l’accès à ses données personnelles à une ou plusieurs personnes désignées par l’internaute à son décès. Le Notaire peut bien entendu conserver ce type de directives et accompagner le client lors de la rédaction de ses souhaits de directives.  

Le recours à un écrit paraît le plus adapté, écrit auquel sera joint la copie de la pièce d’identité de l’internaute. Et le testament peut être l’instrument idéal. Ainsi, l’internaute/testateur désignera une ou plusieurs personnes pour exercer ses missions à son décès conformément à ses souhaits : comme l’effacement de l’ensemble de ses données numériques personnelles ou la transmission, à l’exception de messages privés par exemple.