Éclairage

FISCALITE ET SUCCESSIONS: QUELLES EVOLUTIONS ?

03/04/2023

Le point avec Gilles Bonnet, notaire associé.

Peut-on s’attendre à un allègement des droits de mutation à titre gratuit ?    

Il convient de revenir sur le contexte politique. Emmanuel Macron, alors candidat à l’élection présidentielle de 2022, s’était engagé à réduire les droits de mutation à titre gratuit. Une promesse de campagne également formulée par les Républicains. En clair, il s’agissait d’augmenter le montant de l’abattement dans les transmissions entre parents et enfants. Un montant actuellement plafonné à 100 000 euros par enfant. In fine, cette promesse a été repoussée aux calendes grecques…   

Au vu du contexte économique et budgétaire, on peut s’interroger sur la pertinence d’une telle mesure. Il n’est pas certain que les finances publiques puissent supporter une baisse des droits de succession notamment au regard des dépenses conséquentes engagées ces derniers temps par l’État, en particulier lors de la crise sanitaire.     

Face à une conjoncture difficile, ne faut-il pas anticiper un durcissement de la fiscalité notamment en matière d’immobilier ?   

Là non plus l’horizon n’est pas dégagé. Il existe un régime de faveur qui est dans le viseur du législateur : celui s’appliquant à la cession de la résidence principale. En l’état actuel du droit, la plus-value réalisée lors d’une telle opération est exonérée d’impôt sur le revenu. Or, cet avantage fiscal pourrait être davantage encadré à l’avenir.

D’autres évolutions législatives pourraient-elles intervenir ?   

Dans une logique de simplification de notre droit, on pourrait envisager que le régime des plus-values sur valeurs mobilières (qui concerne notamment les actions et les obligations) soit aligné sur celui de l’immobilier. C’est un chantier assez gigantesque qui pourrait être mené au cours des prochaines années.   

Dans ce contexte, conseillez-vous à vos clients d’attendre pour réaliser les actes qu’ils comptaient réaliser en 2023, ou au contraire les invitez-vous à agir dès à présent ?   

Au niveau patrimonial, la loi de finances pour 2023 n’a pas apporté de changement notable. Aujourd’hui, la fiscalité des particuliers en matière de transmission est d’une remarquable stabilité. Comme nous n’avons pas encore de visibilité sur la prochaine loi de finances, j’ai tendance à dire qu’il faut transmettre dès lors que l’opération ne met pas en danger le patrimoine du donateur. Il ne faut pas hésiter, car il n’est pas certain que notre législation se dirige vers un allègement de la fiscalité.    

Par ailleurs, n'oublions pas que la loi impose un écart de quinze ans entre deux donations. Ce délai, également nommé rappel fiscal, vaut pour toutes les donations, quel que soit le lien entre le donateur et le donataire. Par conséquent, plus tôt on donne, mieux c’est ! A fortiori si l’on souhaite réaliser plusieurs donations.     

Concernant les précautions habituelles, je recommande à mes clients de suivre de près le barème de l’usufruit. J’attire également l’attention de nos lecteurs sur la question du testament. C’est un sujet très sensible qui nécessite de prendre conseil chez son notaire. Un testament implique une rédaction complexe qui ne s’improvise pas. Trop nombreux sont nos concitoyens qui s’informent uniquement via Internet pour rédiger un tel acte. Or, chacun sait qu’un testament ambigu ou mal rédigé peut avoir des conséquences juridiques et humaines absolument désastreuses…